vendredi 9 avril 2021

La Blanche Hermine de Gilles Servat 1971

 

La Blanche Hermine  de Gilles Servat (1971)

Lien : https://www.youtube.com/watch?v=k4t1w7Xqqsw

 

J'ai rencontré ce matin devant la haie de mon champ
Une troupe de marins d'ouvriers de paysans
Où allez-vous camarades avec vos fusils chargés
Nous tendrons des embuscades viens rejoindre notre armée

La voilà la Blanche Hermine vive la mouette et l'ajonc
La voilà la Blanche Hermine vive Fougères et Clisson!

Où allez-vous camarades avec vos fusils chargés
Nous tendrons des embuscades viens rejoindre notre armée
Ma mie dit que c'est folie d'aller faire la guerre aux Francs
Mais je dis que c'est folie d'être enchaîné plus longtemps

La voilà la Blanche Hermine vive la mouette et l'ajonc
La voilà la Blanche Hermine vive Fougères et Clisson!

Elle me dit que c'est folie d'aller faire la guerre aux Francs
Mais je dis que c'est folie d'être enchaîné plus longtemps
Elle aura bien de la peine pour élever les enfants
Elle aura bien de la peine car je m'en vais pour longtemps

La voilà la Blanche Hermine vive la mouette et l'ajonc
La voilà la Blanche Hermine vive Fougères et Clisson!

Elle aura bien de la peine pour élever les enfants
Elle aura bien de la peine car je m'en vais pour longtemps
Je viendrai à la nuit noire tant que la guerre durera
Comme les femmes en noir triste et seule elle m'attendra

La voilà la Blanche Hermine vive la mouette et l'ajonc
La voilà la Blanche Hermine vive Fougères et Clisson!

Je viendrai à la nuit noire tant que la guerre durera
Comme les femmes en noir triste et seule elle m'attendra
Et sans doute pense-t-elle que je suis en dérais
De la voir mon coeur se serre là-bas devant la maison

La voilà la Blanche Hermine vive la mouette et l'ajonc
La voilà la Blanche Hermine vive Fougères et Clisson!

Et sans doute pense-t-elle que je suis en déraison
De la voir mon coeur se serre là-bas devant la maison
Et si je meurs à la guerre pourra-t-elle me pardonner
D'avoir préféré ma terre à l'amour qu'elle me donnait

La voilà la Blanche Hermine vive la mouette et l'ajonc
La voilà la Blanche Hermine vive Fougères et Clisson!

Et si je meurs à la guerre pourra-t-elle me pardonner
D'avoir préféré ma terre à l'amour qu'elle me donnait
J'ai rencontré ce matin devant la haie de mon champ
Une troupe de marins, d'ouvriers, de paysans

La voilà la Blanche Hermine vive la mouette et l'ajonc
La voilà la Blanche Hermine vive Fougères et Clisson!

Du temps où le duché de Bretagne était un État souverain, la blanche hermine était son emblème, et sa devise était « Kentoc'h mervel eget bezañ saotret », c'est-à-dire : « Plutôt la mort que la souillure ». La légende veut que la duchesse Anne de Bretagne (1477-1514) vit, au cours d'une chasse, une hermine choisir de mourir plutôt que de salir sa fourrure en traversant un cours d'eau boueux... On aime bien l'idée que La Blanche Hermine soit de vieille tradition et chante l'immémorial orgueil des Bretons face à l'envahisseur français - désigné comme tel, sans ambiguïté, au deuxième couplet : « Ma mie dit que c'est folie d'aller faire la guerre aux Francs/Moi, je dis que c'est folie d'être enchaîné plus longtemps. »

La Blanche Hermine est en fait une chanson de Gilles Servat composée en 1970 dont le texte est l'affirmation revendiquée de l'identité bretonne.

L'album et l'époque

Un matin de 1970, dans sa chambre de bonne rue Rosa-Bonheur dans le 15e arrondissement de Paris, Gilles Servat, âgé de 25 ans,  a l'idée d'écrire une chanson après avoir entendu un chant irlandaise racontant le départ d'un partisan avec une balle dans sa poche. Le soir même, il l'interprète pour la première fois au Ti Jos, un restaurant breton de Montparnasse où il fait habituellement la manche. Les mots et l'énergie revendicative du morceau touchent le public breton à la surprise de l'artiste.

Après mai 68, l'époque est aux luttes sociales. La Bretagne connaît une crise identitaire et une transition économique. Gilles Servat écrit des paroles guerrières pour une prise de conscience de l'état de la Bretagne, il souhaite une révolte des Bretons : « C'est devenu une chanson traditionnelle. Mais les gens ne la prennent pas comme nous. Nous, on pensait vraiment aller faire la guerre. Tout était tellement noir. La Bretagne se vidait, la langue mourait, on avait l'impression qu'on voulait transformer la Bretagne en station balnéaire. Et il n'y avait pas d'Europe ! On était seuls face au pouvoir. »

La Blanche Hermine de Servat où le héros part faire la guerre aux Francs pourrait très bien passer pour une œuvre bien plus ancienne. L'artiste capte un flux émotionnel se portant à la fois sur sa personne et la mère patrie qu'il se charge d'incarner. Le texte, avec la mention qui y est faite des forteresses de Fougères et Clisson, renvoie apparemment au souvenir de guerres féodales ayant opposé des Bretons et des Français sur la frontière du duché comme lors de la guerre de Bretagne au XVe siècle. Toutefois, l'évocation de guerilleros insurgés partant en embuscade « avec des fusils chargés » suggère un passé moins éloigné, laissant comme seul cadre temporel plausible les guerres de la Chouannerie, époque magnifiée par La Villemarqué dans le Barzaz Breiz. De ce fait, la chanson est souvent reprise dans des recueils consacrés aux Chouans et à la Vendée.

Reprises : en 2010, le groupe punk Les Ramoneurs de menhirs l'adapte et l'enregistre sur l'album Amzer an dispac'h ! En 2017 le Chœur Montjoie Saint-Denis à repris le titre dans son album Chants d'Europe. En 2018, le groupe de chanteurs d'opéra Les Stentors reprend le titre pour son album Un Tour en France.

Gilles le Barde : Gilles Servat est un chanteur et poète breton aux textes forts, sans langue de bois, introspectifs, parfois virulents et souvent sérieux  dans la défense de sa région, sa langue et son folklore (protest-songs). Tiraillé entre Paris et sa Bretagne, il décrit sa terre avec passion en français, en breton ou dans les langues celtiques. Il aura un beau succès avec "La Blanche Hermine" en 1971-72 (premier album). "Ki Du" (Chien noir) est le titre de son deuxième album.

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