La pandémie de coronavirus,
une "chance" pour les énergies renouvelables ? Par Corentin
Patrigeon, le 23/03/2020
ÉNERGIE. Le confinement sanitaire et la crise
économique induits par la pandémie du Covid-19 impactent nombre de secteurs
d'activité, et celui de l'énergie ne fait pas exception. Au moment où les
marchés du pétrole et du gaz sont fortement déséquilibrés du fait d'une offre
excessive et d'une demande en chute, les énergies renouvelables peuvent avoir leur
carte à jouer dans les futurs plans de relance des gouvernements.
Voilà un virus
qui ébranle le monde entier : le confinement sanitaire et la crise
économique induits par la pandémie du Covid-19 impactent nombre de secteurs
d'activité, dont celui de l'énergie, dans l'écrasante majorité des pays, a fortiori
dans un monde plus que jamais globalisé et ouvert à tous les flux. Pourtant, il
est intéressant d'observer ce qui se déroule actuellement sur les marchés et
sur la composition du mix énergétique en ces temps troublés, et c'est bien le
rôle de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) et de ses équipes,
actuellement en télétravail comme beaucoup de salariés qui peuvent bénéficier
de cette possibilité. Le premier
enseignement de l'Agence porte sur la place de l'électricité dans nos sociétés
modernes, où les évènements actuels démontrent notre extrême dépendance à cette
source d'énergie : des millions de personnes confinées dans leurs domiciles
sont amenées à utiliser leurs équipements informatiques pour se connecter à
Internet, travailler à distance, passer des commandes, consulter de la musique
ou des vidéos... Mais les autorités sanitaires et les personnels soignants en
ont également besoin, afin de communiquer et de transmettre les dernières
informations sur le coronavirus entre les pays, et de faire fonctionner les
matériels médicaux présents dans les hôpitaux qui accueillent les malades.
L'approvisionnement électrique se doit donc d'être fiable pour pouvoir
alimenter l'ensemble de ces appareils et services, ce qui a amené des gestionnaires
de réseaux, comme RTE en France,
à élaborer des Plans de continuité d'activité pour garantir le bon
fonctionnement des systèmes électriques nationaux.
L'occasion de renforcer la place des renouvelables dans les plans
de relance
Si la crise mondiale du coronavirus engendre bien évidemment des
conséquences regrettables, ce sera peut-être aussi l'occasion, après coup, de repenser
un certain nombre de sujets, comme celui de la transition énergétique. Par
exemple, l'AIE estime que les plans de relance qui seront inéluctablement
concoctés par les gouvernements une fois que la pandémie sera passée, devront
accorder une large place aux énergies renouvelables. "Des investissements
à grande échelle pour stimuler le développement, le déploiement et
l'intégration de technologies d'énergie propre - telles que l'énergie solaire,
éolienne, l'hydrogène,
les piles et le captage du carbone - devraient être au cœur des plans des
gouvernements, car ils apporteront le double avantage de stimuler les économies
et d'accélérer les transitions énergétiques propres",
assure l'Agence. Une prise en compte d'autant plus pertinente que les
cours mondiaux du pétrole et du gaz sont aujourd'hui confrontés à une situation
inédite : sur ces deux marchés, la demande s'effondre à cause de la
pandémie, à un moment où l'offre, déjà excessive, continue à augmenter
largement. "Dans certains pays, la production et les exportations de
pétrole et de gaz à grande échelle fournissent un revenu vital pour financer
leurs budgets nationaux, ce qui signifie que la volatilité des marchés mondiaux
de l'énergie peut se traduire presque instantanément par des pressions
macroéconomiques", avertit l'AIE. Dans les faits, cela peut se
traduire par des coupes plus ou moins importantes dans les dépenses publiques,
des baisses de salaires ou encore une mise en pause - voire un abandon - de
grands projets d'investissements. Des décisions qui contribuent à aggraver le
ralentissement de la croissance économique, quand il ne s'agit pas de
récession. Pour contrer cela, certains pays producteurs d'énergies
fossiles envisagent d'importantes réformes structurelles pour diversifier leur
économie, tout en encourageant la croissance du secteur privé. Dans certains
cas, les colossaux revenus du pétrole ou du gaz peuvent effectivement être
fléchés vers des investissements stratégiques permettant d'ouvrir des économies
nationales à d'autres secteurs d'activité, notamment les énergies
renouvelables.
Quels risques à terme pour les pays producteurs et
exportateurs de pétrole ?
En raison
du contexte actuel, et avec les prix du pétrole que l'on connaît en ce moment,
les pays producteurs pourraient voir leurs revenus issus de l'or noir fondre
jusqu'à 85%, pour les plus vulnérables d'entre eux. Leurs finances publiques
s'en trouveront grandement fragilisées, creusant les déficits et faisant
plonger les recettes d'exportation, déséquilibrant in fine les balances
commerciales et dévaluant les devises internationales. D'après l'AIE, le seul
moyen pour ces pays de maintenir la stabilité monétaire serait alors de
prélever des réserves stratégiques de change, du fait de taux de change
nationaux corrélés à des devises étrangères.
Coup de projecteur sur le biogaz
et le biométhane
Parmi ces
énergies propres, l'AIE attire notamment l'attention sur le biogaz et le
biométhane, dont la production est par définition facilitée par les importantes
quantités de déchets que notre société contemporaine produit au quotidien (résidus
agricoles, déchets alimentaires, fumier animal...). Le développement de ces
deux énergies assurerait, dans le cas du biogaz, une source locale
d'électricité et de chaleur, et dans le cas du biométhane, les mêmes avantages
que le système de gaz naturel, mais sans les émissions polluantes qui vont
avec. Selon les spécialistes de
l'Agence, toutes les régions du monde disposent d'un important potentiel de
production pour ces deux énergies, sachant que la disponibilité des matières
premières durables qui leur sont nécessaires devrait bondir de 40% d'ici 2040. "Alors
que les gouvernements cherchent à accélérer leurs transitions énergétiques, ils
ne doivent pas oublier l'importance des gaz à faible teneur en carbone tels que
le biométhane et le biogaz", a insisté le directeur exécutif de l'AIE,
Fatih Birol. "Entre autres avantages, le biogaz et le biométhane
offrent également un moyen d'amener les collectivités et les industries locales
dans la transformation du secteur de l'énergie."
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire