Hugo Marchand : "Rester
en forme pour danser, c'est ma responsabilité"
Au menu du confinement pour le danseur étoile : discipline, pompes et
pensées positives. Le but : en sortir grandi et prêt pour remonter sur scène.
Pour nous.
Hugo Marchand,
septembre 2019 • Crédits : Matthew Brookes, Opéra de Paris
"I already miss dancing "(la danse me manque déjà). C’est ce
qu’écrit Hugo Marchand le 20 mars sur Instagram (@humarchand). Au-dessus de la
légende, on le voit danser, collants bleus, dans le lac des Cygnes, sur la
scène de l’Opéra Bastille. Nous étions alors au Jour 4 du confinement. Nous
sommes au jour 15 et le danseur étoile, 26 ans, accro depuis qu’il en a 9,
continue de publier des souvenirs. Il lui faut sa dose. De dopamine et de
mouvement : “Comme on a besoin de manger, de dormir ou de boire, moi
j'ai besoin de danser (…) C’est un outil, une manière de s'exprimer qu'on n'a
plus et on ne libère pas du tout les mêmes hormones. On a ce manque physique
qui est très présent et qu'on essaye de palier en faisant d'autres choses mais
ce n’est pas facile”. Impossible, même.
"Je n'ai
pas envie de me dire que j'ai passé deux mois à ne rien faire". @humarchand
Avant le confinement, Hugo Marchand, nommé danseur étoile il y a 3 ans,
enchainait parfois entrainements, répétitions et spectacle jusqu’à 7 heures par
jour.
Aujourd’hui, enfermé à Biarritz avec son mètre quatre-vingt douze et sa
paire de chaussons, rien à voir : “Je ne peux pas sauter, je ne peux
pas tourner parce que je n'ai pas de sols adéquates pour le faire et puis je
n'ai pas de place”. Alors il tente de “limiter les dégâts” en
s’imposant ce qui fait son quotidien depuis plus de quinze ans : une
routine. Dix heures et demi, étirements. Onze heures, “une barre” en
visioconférence sur sa tablette, en groupe avec un prof, “on arrive à
retrouver une ambiance de classe”.
Le jour où nous l'interrogeons, il rentre d’un jogging de quarante minutes,
nous parle aussi d’abdominaux et de pompes, “j'en suis à trois séries de
quinze par jour” et ne compte pas en rester là : “Chaque jour, on
fait un peu plus pour essayer toujours d'avoir un objectif, de l’atteindre,
d'en être content, d'en être fier et d'avoir un nouvel objectif pour le
lendemain. Moi, c'est ça qui me rassure (…) Ça libère aussi des hormones
positives et c'est une manière de garder la pêche, de garder un état d'esprit
combatif et fort (…) Se dire qu'à la fin de ce confinement je vais avoir
compris d'autres choses sur mon corps. Continuer à le faire travailler. C’est
rassurant”.
Se rassurer. Une mission pour Hugo Marchand pendant cet enfermement inédit.
Pour “ne pas repartir de trop loin” ni se blesser une fois la liberté
retrouvée : “Si on ne fait vraiment rien pendant un mois et demi, deux
mois, physiquement on prend vraiment des risques au retour. C'est aussi une
manière d'anticiper la reprise”.
Prévoyant et concerné : “Je me dis surtout que les gens vont avoir
besoin d'aller au spectacle après cette période compliquée, difficile. Ils vont
avoir besoin de se changer la tête, de voir de la danse, d’aller au concert.
J’ai l'impression d’avoir une forme de responsabilité par rapport aux autres,
c'est un peu bizarre de penser comme ça mais je pense que c'est important (…)
Le plus on arrive à rester en forme, le plus vite on va réussir à remonter sur
scène, le plus vite les spectacles pourront reprendre, le plus vite les gens
pourront rêver de nouveau !”
Quant à ce qui se passe dehors, évidemment, l'artiste sait : “Tout le
monde est stressé, tout le monde est anxieux, tout le monde a peur (…) On a un
peu l'impression que tout se retourne contre l’humanité”. Mais les infos
trop anxiogènes, il les l’évite, “si on commence à compter le nombre de
morts par jour et puis à se morfondre sur notre situation, ça va être terrible”.
Il s’emploie plutôt à ne retenir que "le positif" pour garder “une
tête saine”. Comme l’air plus pur à Pékin ou l’eau plus claire à Venise.
L’occasion, pourquoi pas, il l’espère en tout cas, “qu’une grande conscience
écologique se mette en place”.
Ecouter des podcasts de méditation aussi, lire (dans sa valise il a
notamment embarqué un bouquin d’Edouard Louis, un autre de Laurent Gaudé),
réécouter ou revoir des chefs-d’oeuvre. S’attarder “sur ce que l'humanité
peut faire de plus beau”.
Faire, finalement, de la contrainte, une liberté : “Je crois que c'est
rassurant de se dire que ce temps mort, il faut essayer de le mettre à profit.
Continuer à progresser, continuer à grandir, que ce soit physiquement, que ce
soit intellectuellement, pour ne pas se réveiller dans six semaines ou deux
mois et demi en se disant ”Merde, j'ai perdu 2 mois de ma vie à rien
faire” ”.
https://www.franceculture.fr/emissions/confinement-votre/hugo-marchand-rester-en-forme-cest-ma-responsabilite
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